Fath El Akbar – Naissance de la voie

Il rentra enfin au Maghreb et s’installa à Tlemcen au cours de la même année que celle où il effectua son pèlerinage, en 1188 H. C’est dans cette ville qu’il fit la rencontre du premier de ses futurs disciples, le grand savant Sidi Mohamed ibn Mechri (qu’Allah l’agrée). Il lui transmit la Tariqa Khalwatiya puis le désigna pour diriger la prière, car Seïdina (qu’Allah sanctifie son précieux secret) n’aimait pas assumer cette charge. Sidi Mohamed ibn Mechri (qu’Allah l’agrée) demeura son fidèle compagnon jusqu’à son décès qui eut lieu en 1224 H.

Durant cette période à Tlemcen, certaines personnes vinrent visiter Seïdina Ahmed Tidjani (qu’Allah sanctifie son précieux secret) pour le prendre comme Cheikh et s’abandonner entre ses mains. Toutefois, à ceux auxquels il octroyait l’autorisation, il disait (qu’Allah sanctifie son précieux secret) : « Nous sommes juste des compagnons et il n’y a pas de Cheikh entre nous. »

En 1191 H Seïdina (qu’Allah sanctifie son précieux secret) entreprit de se rendre à Fès pour la visite pieuse de Moulay Idriss (qu’Allah l’agrée). En passant à Oujda, il fit la rencontre de l’un de ses plus grands compagnons, Sidi Hajj &’Ali Harazim (qu’Allah l’agrée). Celui-ci se joignit à une caravane qui se dirigeait à Fès et il fit la connaissance de Seïdina (qu’Allah sanctifie son précieux secret) qui se présenta à lui ; or Sidi Hajj &’Ali (qu’Allah l’agrée) l’avait vu en rêve deux ans auparavant et il savait qu’il deviendrait son compagnon, mais il l’avait oublié. Après deux ou trois jours passés ensemble, Seïdina (qu’Allah sanctifie son précieux secret), par son prodige du dévoilement, lui rappela ce rêve avec précision, son compagnon de voyage (qu’Allah l’agrée) en fut impressionné puis Seïdina (qu’Allah sanctifie son précieux secret) ajouta : « Sache que je ne voulais que cette rencontre et louange à Allah ».

Une fois arrivé à Fès, Seïdina (qu’Allah sanctifie son précieux secret) s’établit un moment en ses lieux pour visiter la tombe de Sidi Moulay Idriss (qu’Allah l’agrée). Durant ce temps, il transmit également la voie Khalwatiyya à Sidi Hajj &’Ali (qu’Allah l’agrée) et lui enseigna de ce qu’Allah lui avait révélé parmi les sciences et secrets de la Sunna. Lorsque le moment de retourner à Tlemcen arriva, après avoir fait ses adieux à Sidi Hajj &’Ali Harazim (qu’Allah l’agrée), il lui recommanda : « Accroche-toi au pacte et à l’amour (Mahaba) jusqu’à ce que tu atteignes l’Ouverture spirituelle (Fath) ». Seïdina Ahmed Tidjani (qu’Allah sanctifie son précieux secret) lui annonça également (qu’Allah l’agrée) qu’il prévoyait de quitter Tlemcen pour un autre endroit qu’Allah lui aurait choisi, car son état ne pouvait s’accorder avec ce lieu où il se trouvait être dans un état de resserrement.

Il retourna (qu’Allah sanctifie son précieux secret) ainsi à Tlemcen et demeura là-bas quelque temps, jusqu’à ce que sa renommée grandissante finisse par inquiéter le Bey Mohamed ibn &’Othman. Ce dernier entreprit d’intimider ceux qui se rendaient auprès de lui (qu’Allah sanctifie son précieux secret) et surtout depuis qu’il dirigea lui-même une armée afin d’attaquer la ville de Laghouat et celle de &’Aïn Madhi. Aussi, Seïdina (qu’Allah sanctifie son précieux secret) prit la direction du désert en 1196 H et demeura dans le village ancestral de Boussemghoune.

Ce ksar porte notamment le nom d’un Pôle qui avait résidé dans la cité où il est d’ailleurs enterré. Certains disent que quarante Pôles auraient habité cette ville et que le quarantième serait Seïdina Ahmed Tidjani (qu’Allah sanctifie son précieux secret). De là-bas, il partit visiter certains Wali vertueux de la ville de Touat, avec qui il échangea des connaissances, des secrets et plus particulièrement avec le Connaissant Sidi Mohammed ibn Foudaïl (qu’Allah l’agrée). Il retourna par la suite à Boussemghoune.

C’est justement dans ce village, alors qu’il était âgé de 46 ans, que Seïdina Ahmed Tidjani (qu’Allah sanctifie son précieux secret) eut son plus précieux et plus majestueux prodige. Alors qu’il s’était retiré (qu’Allah l’agrée) comme à son habitude dans l’une des pièces de sa demeure, en pleine journée, il eut sa Grande Ouverture (Fath El Akbar). C’est au cours de cet instant que vint à lui (qu’Allah sanctifie son précieux secret), et à l’état de veille, le noble Prophète Mohammed (que la prière et la paix d’Allah soient sur lui).

Le maître de l’existence (que la prière et la paix d’Allah soient sur lui) lui annonça à l’état de veille : « Je suis désormais ton initiateur, ton Maître, aucun être humain ne prétendra être ton initiateur. Il te faut en conséquence abandonner tout ce que tu as pris précédemment de l’ensemble des voies, personne n’aura de reproche à te faire, car c’est moi qui serai ton intermédiaire auprès d’Allah et aussi ton aide ».

Il devint (qu’Allah sanctifie son précieux secret) le dépositaire de la voie spirituelle du bien aimé Prophète (que la prière et la paix d’Allah soient sur lui) lui-même, voie mère qui renferme en elle toutes les autres voies. C’est la Tariqa Ahmediya, Mohammediya, Ibrahimiya, Hanifiya qui contient des grâces immenses jamais obtenues par toutes les autres voies, tout comme la communauté du bien aimé Prophète Mohammed (que la prière et la paix d’Allah soient sur lui) possède des grâces qui n’ont jamais été obtenues par toutes les autres communautés avant l’Islam. Tout cela provient du fait que cette voie tire son origine et son irrigation du Sceau des prophètes et messagers (que la prière et la paix d’Allah soient sur lui). Cheikh Mohiedine ibn ‘Arabi (qu’Allah l’agrée) avait dit : « Les Aouliya se trouvent sur les traces de pas des prophètes , chaque Wali est sur les pas d’un prophète ».

Ainsi, chaque Chouyoukh s’abreuve dans la source spirituelle d’un des prophètes d’Allah . Bien évidemment, la plus haute station spirituelle chez les Chouyoukh est celle qui s’abreuve à la plus haute station chez les prophètes qui est assurément celle de leur Sceau, notre maître Mohammed (que la prière et la paix d’Allah soient sur lui). Il est la source mère et l’origine de toutes les sources spirituelles. Seïdina Ahmed Tidjani (qu’Allah sanctifie son précieux secret) est donc passé d’une chaîne spirituelle qui comprenait de nombreux maîtres sur plusieurs siècles pour remonter jusqu’aubien aimé Prophète (que la prière et la paix d’Allah soient sur lui), à désormais une seule et unique chaîne précieuse le reliant directement à lui (que la prière et la paix d’Allah soient sur lui).

Les vertus attachées à la voie du bien aimé Prophète (que la prière et la paix d’Allah soient sur lui) et à son Khalife Sidi Ahmed Tidjani (qu’Allah sanctifie son précieux secret) sont innombrables.

Le bien aimé Prophète (que la prière et la paix d’Allah soient sur lui) enseigna à Seïdina (qu’Allah sanctifie son précieux secret) le Ouird qu’il devait transmettre et qui contient les lumières de sa station particulière puis, il lui dicta les conditions inhérentes à sa voie. Il lui octroya également (que la prière et la paix d’Allah soient sur lui) des oraisons qui lui étaient spécifiquement réservées ainsi que leurs planifications, dont le contenu devait rester caché.

Seïdina (qu’Allah sanctifie son précieux secret) a dit : « Je ne récite aucune évocation sans qu’elle ne me soit planifiée et spécifiée par le Messager d’Allah (que la prière et la paix d’Allah soient sur lui). »

Parmi les dons immenses qu’il a reçus pour lui-même (qu’Allah sanctifie son précieux secret) ainsi que pour ses disciples, se trouve une prière sur le bien aimé Prophète (que la prière et la paix d’Allah soient sur lui) nommée Salat Fatihi.

Bien qu’il ait connu et qu’il ait accompli cette prière avant de la recevoir directement du bien aimé Prophète (que la prière et la paix d’Allah soient sur lui), en réalité Salat Fatihi et ses mérites étaient réservés pour son époque. C’est ainsi que seuls lui-même, l’ensemble de ses disciples et ceux qui en ont reçu l’autorisation peuvent tirer profit de l’étendue de ses mérites particuliers. Il a dit (qu’Allah sanctifie son précieux secret) : « Je m’occupais de faire Salat Fatihi de mon retour du pèlerinage jusqu’à Tlemcen, car j’avais eu connaissance des mérites qu’elle contenait. En effet, lorsqu’elle est récitée une seule fois elle équivaut à la récitation de 600.000 autres prières comme il est rapporté dans Ouird Jouyoub. Son auteur a raconté que celui qui l’a mentionné est Sidi Mohamed El Bakri Siddiq qui était un Pôle et qui a dit : « Celui qui la récite une fois et qui n’entre pas au paradis, qu’il m’attrape et m’emmène (le jour du Jugement dernier) devant Allah ». Ainsi, je n’ai cessé de l’évoquer, et ce, jusqu’à mon départ de Tlemcen pour Boussemghoune. Puis, j’ai constaté qu’une autre prière équivalait à 70.000 lectures de Dalaïl El Khaïrat alors j’ai abandonné Salat Fatihi et ne me suis occupé que de cette prière en question, en raison de ses bienfaits. Ensuite, le Prophète (que la prière et la paix d’Allah soient sur lui) m’ordonna de retourner à Salat Fatihi et je lui ai demandé quels en étaient ses mérites. Il m’informa (que la prière et la paix d’Allah soient sur lui) qu’une seule récitation équivalait à toutes les glorifications faites dans la création ainsi qu’à toutes les formules d’évocations et de supplications grandes ou petites […] »

Il a dit aussi (qu’Allah sanctifie son précieux secret) : « Salat Fatihi est un acte Divin (c’est-à-dire une grâce Divine) qui ne laisse pas de place à la raison humaine. S’il y avait 100.000 communautés, et que chacune soit composée de 100.000 tribus et que chaque tribu soit composée de 100.000 hommes et que chacun de ces hommes vive 100.000 ans et récite chaque jour 100.000 prières sur le Prophète (que la prière et la paix d’Allah soient sur lui) autre que la Salat Fatihi, et que l’on rassemblait toute la récompense de ces communautés durant toute cette période, ils n’arriveraient pas à la récompense de l’évocation d’une seule Salat Fatihi. »

Il reçut également (qu’Allah sanctifie son précieux secret) une autre prière particulière sur le bien aimé Prophète (que la prière et la paix d’Allah soient sur lui) du nom de Djaouharatou-l-Kamel dont l’énoncé magistral est un concentré de la connaissance de la Réalité Mohammadienne. Ses mérites et secrets sont multiples. Dans une lettre, Seïdina (qu’Allah sanctifie son précieux secret) a mentionné entre autres : « Sache qu’Allah nous a graciés d’une bonté immense par le don de la prière appelée Djaouharatou-l-Kamel. En effet, toute personne qui la récitera 12 fois avec des ablutions complètes puis dit : « Ceci est un cadeau pour toi, ô ! Messager d’Allah », c’est comme s’il avait visité le Prophète (que la prière et la paix d’Allah soient sur lui) dans son Raouda Chérifa (emplacement dans la mosquée du Prophète (que la prière et la paix d’Allah soient sur lui) à Médine dénommé « jardin paradisiaque ») et c’est comme s’il avait visité tous les Aouliya qui vécurent depuis l’exil du Prophète (que la prière et la paix d’Allah soient sur lui) jusqu’à l’accomplissement de ce Dhikr. Remarque, qu’Allah te fasse miséricorde, ces grandes faveurs, ces pierres précieuses d’une grande valeur qu’Allah le Généreux nous a données et dont furent privés tous les autres peuples […] »

Le bien aimé Prophète (que la prière et la paix d’Allah soient sur lui) lui donna quelques recommandations lui étant particulières (qu’Allah sanctifie son précieux secret) ainsi que des conseils sur la ligne de conduite à tenir :

« Maintiens-toi dans cette Tariqa sans te retirer du monde ni cesser d’être en relation avec les hommes jusqu’à ce que tu atteignes la station spirituelle qui t’est promise, tout en gardant ton état, sans grande gêne, ni difficulté, ni effort cultuel excessif. Renonce désormais à tous les saints ».

Seïdina (qu’Allah sanctifie son précieux secret) devait dire plus tard : « Certes, nous avons pris de nombreux Chouyoukh, qu’Allah les agrée, mais Allah a décrété qu’aucun d’eux ne devait me faire parvenir à mon objectif. Ainsi, notre chaîne et notre maître dans cette voie remontent au maître de l’existence (que la prière et la paix d’Allah soient sur lui) et Allah a également décrété que notre ouverture ainsi que notre obtention ne se réaliseraient qu’entre ses mains (que la prière et la paix d’Allah soient sur lui). Aucun autre Chouyoukh n’a d’emprise sur nous. Et cela est suffisant. »

Alors que jusqu’à présent il avait toujours décliné le rôle de Cheikh, Seïdina (qu’Allah sanctifie son précieux secret) devint le représentant du bien aimé Prophète (que la prière et la paix d’Allah soient sur lui) dans la transmission de sa voie. Dès qu’il reçut ce noble dépôt et cette lourde charge, il fut animé (qu’Allah sanctifie son précieux secret) d’un sentiment de crainte, mais également d’espoir afin que cela soit une cause de salut pour les membres de la Communauté du bien aimé Prophète (que la prière et la paix d’Allah soient sur lui). Aussi en fit-il part au Prophète (que la prière et la paix d’Allah soient sur lui) qui lui confirma cela en lui dévoilant : « Tu es la porte de salut pour tout désobéissant qui se fait du tort à lui-même. »

C’est empreint de ce même état d’esprit que, lorsque Seïdina Ahmed Tidjani (qu’Allah sanctifie son précieux secret) rédigea sa demande de garantie au bien aimé Prophète (que la prière et la paix d’Allah soient sur lui), pour lui-même et ses compagnons, il annota : « Je demande par la faveur de notre maître le Messager d’Allah (que la prière et la paix d’Allah soient sur lui) qu’il garantisse, pour moi et tous ceux-là, que je meure ainsi que chaque vivant parmi eux dans la foi et l’Islam. Je demande qu’Allah le Très Haut nous préserve de tous Ses châtiments, peurs, craintes et frayeurs, de tous les maux de l’instant de la mort jusqu’à l’établissement dans le paradis et qu’Il me pardonne ainsi qu’à eux pour tous les péchés précédents ainsi que ceux qui doivent survenir. Je demande qu’Allah le Très Haut nous ombrage de Son Trône au Jour Dernier et qu’Allah le Très Haut nous abreuve du Bassin de notre maître le Messager d’Allah (que la prière et la paix d’Allah soient sur lui). Je demande que notre Seigneur nous fasse tous entrer au paradis sans subir ni jugement, ni châtiment, dans le premier groupe qui y entrera et que notre Seigneur nous établisse tous dans le &’Iliyyine du Paradis Firdaous et &’Adnane. Et je demande également au Messager d’Allah (que la prière et la paix d’Allah soient sur lui) qu’il nous garantisse, par Allah le Très Haut, tout ce qui est évoqué dans ces notes pour moi-même et l’ensemble de mes compagnons et qu’Allah nous octroie à moi ainsi qu’à eux, toutes ces demandes formulées ici même et intégralement, par une promesse de Sa part qui nous permettra d’atteindre tout ce qui a été évoqué dans cet écrit […]»

Cet écrit fut ensuite remis entre les mains bénies du bien aimé Prophète (que la prière et la paix d’Allah soient sur lui) à l’état de veille et non en songe. Il lui répondit (que la prière et la paix d’Allah soient sur lui) : « Sache que je te garantis toutes les demandes contenues dans ces notes, d’une promesse sans faille à ton égard et à la leur, jusqu’à ce que vous soyez tous en ma compagnie dans les plus hauts degrés du &’Illiyine. Je te certifie cet engagement, sans manquement, pour toutes tes demandes. Et que la paix soit sur toi. »

Durant la période passée dans cette région, Seïdina résida (qu’Allah sanctifie son précieux secret) d’abord dans le petit village avoisinant de Chellala Gueblia de 1196 H à 1199 H puis dans le ksar même de Boussemghoune de 1199 H à 1213 H. À Chellala se trouvent encore les vestiges des endroits où il avait l’habitude de s’isoler pour certains exercices spirituels. D’ailleurs, c’est dans ce village que lui fut attribué le prodige de la vision.

Seïdina Ahmed Tidjani (qu’Allah sanctifie son précieux secret) a rapporté : « C’est lors de cette fameuse année que le prodige de la vision me fut octroyé ». Il fut interrogé sur ce qu’était le prodige de la vision. Il répondit (qu’Allah sanctifie son précieux secret) : « Le Messager d’Allah (que la prière et la paix d’Allah soient sur lui) m’a dit : « Celui qui te verra le jour du vendredi et du lundi, il entrera au Paradis sans jugement ni châtiment […] »

Puis, Seïdina (qu’Allah sanctifie son précieux secret) ajouta : « Je me trouvais à Chellala quand un homme vint me demander : « Nous avons entendu dire que celui qui te voit le vendredi et le lundi, il rentrera au Paradis sans jugement et sans châtiment…Est-ce que cela est vrai ? » Je lui dis : « C’est la vérité.» Il me demanda : « Même si celui qui te voit est altéré ? » Je lui dis : « M’a-t-il vu ? » Il répondit : « Oui. » Je lui dis alors : « Et bien lui aussi il y entrera. » Seïdina (qu’Allah sanctifie son précieux secret) fut ensuite interrogé sur le sens du mot altéré, il répondit : « C’est une personne qui manque de beaucoup de rectitude. »

Il reçut (qu’Allah sanctifie son précieux secret) d’année en année l’initiation directe du bien aimé Prophète (que la prière et la paix d’Allah soient sur lui) ainsi que l’ordre et l’autorisation d’appeler les gens à cette voie. À sa science classique surprenante venait s’ajouter une Connaissance Divine qui ne cessait de croitre. S’ensuivit alors une période de propagation qui dura treize ans dans cette région et d’autres, par le biais de certains compagnons, dont Sidi Mohamed ibn Mechri (qu’Allah l’agrée) et Sidi Mahmoud Tounsi (qu’Allah l’agrée). Les gens affluaient de multiples contrées pour tirer profit de sa Baraka et bénéficier du dépôt que lui avait confié le bien aimé Prophète (que la prière et la paix d’Allah soient sur lui). Des villages et des tribus entiers venaient s’affilier à travers lui (qu’Allah sanctifie son précieux secret). Il en était de même pour les personnalités vertueuses tout comme certains brigands qui venaient se repentir et se réformer grâce à ses lumières. Ainsi, le Connaissant Sidi Mohammed ibn Foudaïl (qu’Allah l’agrée), qu’il avait côtoyé à Touat, vint s’affilier à la Tariqa. D’autres Aouliya venant de Oued Souf (Est algérien près de la frontière tunisienne) en firent de même.

En 1201 H, alors que Seïdina (qu’Allah sanctifie son précieux secret) se trouvait en visite à &’Ain Madhi, un groupe de dix personnes vinrent de Oued Souf pour le voir. Neuf d’entre eux venaient du village de Guemar et le dixième de Taghzout, une localité très proche de leur village. Leur guide était l’un des disciples de Seïdina, Sidi Mohamed Sassi (qu’Allah l’agrée), qui s’était affilié à lui trois ans auparavant. Lors de leur départ Seïdina (qu’Allah sanctifie son précieux secret) leur enjoignit de construire une Zaouiya à Guemar puis de retour chez eux, ils s’efforcèrent de mettre à exécution cet ordre. Ils s’accordèrent sur un emplacement à Taghzout. L’année suivante ils partirent de nouveau visiter Seïdina (qu’Allah sanctifie son précieux secret) qui leur demanda : « Avez-vous construit la Zaouiya ? » Ils lui répondirent : « Oui nous l’avons fait. » Seïdina (qu’Allah sanctifie son précieux secret) leur demanda alors : « En quel endroit ? » Ils répondirent : « A Taghzout. » Mais devant l’insistance de Seïdina Ahmed Tidjani (qu’Allah sanctifie son précieux secret) afin qu’elle soit construite à Guemar, ils lui dirent : « Taghzout et Guemar sont comme une seule ville ». Il leur répondit (qu’Allah sanctifie son précieux secret) : « Allah et son Prophète (que la prière et la paix d’Allah soient sur lui) refusent qu’elle soit située ailleurs qu’à l’est de Guemar. » Finalement Sidi Mahmoud Tounsi (qu’Allah l’agrée) les rejoignit conformément à l’ordre de Seïdina (qu’Allah sanctifie son précieux secret) afin de leur désigner l’endroit désiré et c’est ainsi qu’en 1204 H fut érigé à Guemar la première Zaouiya de l’histoire de cette noble Tariqa Tidjaniya.

Seïdina Ahmed Tidjani (qu’Allah sanctifie son précieux secret) se rendait souvent à &’Aïn Madhi pour visiter sa famille ainsi qu’à Taza pour voir l’un de ses jeunes et pourtant si dévoués et pieux compagnons, Sidi Mohammed ibn &’Arabi Damraoui (qu’Allah l’agrée). C’est notamment lui (qu’Allah l’agrée) qui, au début, a servi d’intermédiaire entre le Prophète (que la prière et la paix d’Allah soient sur lui) et Seïdina (qu’Allah sanctifie son précieux secret). En effet, ce dernier en raison de sa grande pudeur n’arrivait pas à s’exprimer devant le bien aimé Prophète (que la prière et la paix d’Allah soient sur lui) et en oubliait tout. Sidi Mohamed ibn &’Arabi (qu’Allah l’agrée) finit par s’installer auprès de Seïdina (qu’Allah sanctifie son précieux secret) à Boussemghoune puis à &’Aïn Madhi où il décéda en 1204 H.

Ce fut cette même année, à l’occasion de l’Aïd el Adha à &’Aïn Madhi, qu’un autre jeune homme, tout aussi émérite, originaire de Tamacine vint le visiter accompagnant le groupe issu de la ville de Guemar. Il se nommait Sidi Hajj &’Ali ibn Hajj &’Aïssa Tamacini (qu’Allah l’agrée) et, en faisant la rencontre de Seïdina (qu’Allah sanctifie son précieux secret), il décela en lui une dimension bien plus grande que celle que le commun et l’élite pouvaient percevoir. Il décida (qu’Allah l’agrée) d’offrir sa vie à cet homme qui exhalait cette émanation particulière de la proximité Divine, en se dévouant à ses côtés et en laissant derrière lui et sans regret femme et enfants. Seïdina (qu’Allah sanctifie son précieux secret), quant à lui, savait qu’il serait celui à qui il confierait la lieutenance de la Tariqa après sa mort et les bonnes annonces à son sujet furent nombreuses. Aussi, après quelque temps, il le renvoya préparer ce futur destin en lui disant (qu’Allah sanctifie son précieux secret) : « Lorsque tu retourneras en paix à Tamacine, affaire-toi à élargir ta maison et prépare-toi un endroit pour la prière et le Dhikr. Consacre aussi des endroits pour la réception des visiteurs et multiplie la construction de bâtiments, car tu vas atteindre un objectif tel que les gens viendront te visiter de toute part. Ne crains point du Détenteur du Trône qu’Il ne te restreigne, cherche l’aide d’Allah en cela ».

Son compagnon Sidi Hajj &’Ali Harazim (qu’Allah l’agrée) venait souvent le visiter depuis Fès et il fut étonné de constater l’étendue et la profondeur de ses connaissances Seigneuriales qui s’amplifiaient d’une visite à l’autre. Il contemplait les effets des effusions Divines en lui et était ébahi devant son visage qui s’illuminait et sa langue qui charmait ses auditeurs de sciences imperceptibles pour les esprits les plus éveillés. Ceux qui venaient à lui avec des doutes ou des incertitudes repartaient après sa rencontre avec des certitudes et des convictions. C’est Sidi Hajj &’Ali Harazim (qu’Allah l’agrée) aussi qui assuma la place d’intermédiaire six mois après le décès de Sidi Mohamed ibn &’Arabi (qu’Allah l’agrée) par l’autorisation du bien aimé Prophète (que la prière et la paix d’Allah soient sur lui).

À Boussemghoune, Seïdina (qu’Allah sanctifie son précieux secret) eut deux jeunes garçons, Sidi Isma’il et Sidi Mokhtar, qui moururent en bas âge. C’est aussi en ces lieux que naquit un autre fils, Sidi Mohammed el Kebir, de sa mère la pieuse dame Mabrouka, une servante affranchie que Seïdina (qu’Allah sanctifie son précieux secret) épousa. Il se maria aussi avec Moubarika (M’barika) une autre de ses servantes affranchies. Il les appréciait particulièrement en raison de leur piété et de leur dévouement. Seïdina Ahmed Tidjani (qu’Allah sanctifie son précieux secret) avait dit : « La maison qui est bénie est celle qui contient Mabrouka et Moubarika »

Cet ordre prit une expansion considérable en très peu de temps, attisant la jalousie de certaines personnes et provoquant l’inquiétude des autorités turques de l’époque qui imposaient des lois injustes. Là encore, le destin de Seïdina Ahmed Tidjani (qu’Allah sanctifie son précieux secret) allait ressembler une fois de plus à celui du bien aimé Prophète (que la prière et la paix d’Allah soient sur lui).

Tout comme le Prophète (que la prière et la paix d’Allah soient sur lui) dût s’exiler de La Mecque à Médine, Seïdina (qu’Allah sanctifie son précieux secret) fût contraint de le faire de Boussemghoune à Fès. Ainsi, le dix-sept Rabi’ el Awwal de l’an 1213 H, il s’apprêta à prendre la route avec sa famille en passant par le village de Figuig, ksar jumeau de Boussemghoune. Sidi Hajj &’Ali Harazim (qu’Allah l’agrée) ainsi que Sidi Mohamed ibn Mechri (qu’Allah l’agrée) étaient ses accompagnateurs. À l’occasion de ce douloureux départ, les habitants de Boussemghoune hommes, femmes et enfants voulurent abandonner leur magnifique village pour le suivre, mais Seïdina Ahmed Tidjani (qu’Allah sanctifie son précieux secret) les consola et leur demanda de ne pas s’en aller. Ensuite il leur dit (qu’Allah sanctifie son précieux secret) : « Vous avez mon entière acceptation, quelle que soit votre situation ô gens de Boussemghoune. Qu’Allah agisse envers vous avec agrément. »

À ce propos ces vers furent clamés :

« Le dix-sept du mois de la naissance du Prophète (Rabi’ el Awwal) l’année 1213, Boussemghoune a pleuré,

En perdant les souffles du Pôle Tidjani qui de toutes les créatures est sans aucun doute l’irrigateur complet,

Fès s’est alors réjouie de l’arrivée de Tidjani,

La même année le six Rabi’ Thani. »

Seïdina Ahmed Tidjani (qu’Allah sanctifie son précieux secret) quitta ses terres d’origine qui étaient sous la tutelle de l’oppression des autorités de l’époque et de leur loi injuste pour se diriger vers la célèbre ville de Fès, le sanctuaire de la science régi selon les préceptes de la Loi Divine (Chari’a). Il emporta avec lui (qu’Allah sanctifie son précieux secret) le précieux héritage du Prophète (que la prière et la paix d’Allah soient sur lui) : la Tariqa Ahmediya, Mohammediya, Ibrahimiya Hanifiya.

Ils arrivèrent à Fès le six Rabi’ Thani et Seïdina (qu’Allah sanctifie son précieux secret) était âgé de soixante-trois ans. La première nuit, il fit dormir ses bêtes de somme dans la grande cour de la grandiose Mosquée-Université de Qarawiyyine. Certains lui en firent le reproche et soulevèrent une objection, en effet ceux-ci souilleraient ce lieu par leur urine et leurs excréments. Cependant, Seïdina (qu’Allah sanctifie son précieux secret) leur assura solennellement qu’aucune de ses bêtes ne le ferait. Cela semblait, à leurs yeux, impossible, mais le lendemain ils furent surpris de constater qu’effectivement aucune bête n’avait souillé la cour, ce qui relevait du prodige.

Seïdina (qu’Allah sanctifie son précieux secret) fut accueilli dans la maison des parents de son fidèle compagnon Sidi Hajj &’Ali Harazim (qu’Allah l’agrée). Rapidement, l’ampleur de son savoir particulier, la profondeur de ses enseignements et la manifestation de ses prodiges authentiques vont conquérir de plus en plus de cœur. Son assise, qu’il assurait parfois dans la mosquée Diwan et parfois à la Qarawiyyine, était très recherchée. Cet homme simple à l’aspect marqué par la rudesse du désert intrigua les habitants de Fès et leurs savants à l’allure délicate et élégante. Très vite, l’image laissa place au contenu et les savants de Fès ne purent que s’incliner devant l’étendue de son savoir particulier et la perspicacité de sa réflexion. Dans les trois dimensions de la religion, à savoir l’Islam, l’Iman et l’Ihsan, il excellait par sa maîtrise, sa compréhension et son application. C’est par ce biais que ceux qui le croisaient et qui eurent l’occasion d’examiner ses propos et ses actes tombèrent d’admiration devant ce qu’ils considéraient comme la manifestation et la réalisation vivante de l’enseignement prophétique. Un jour, l’un des plus grands savants de Fès, pour qui les gens venaient de très loin assister à son assemblée, Sidi Abdrahman ibn Ahmed Chinguiti (qu’Allah l’agrée), descendant d’Abou Bakr Siddiq (qu’Allah l’agrée) répondit à une remarque d’un élève qui méprisa Seïdina (qu’Allah sanctifie son précieux secret) en lui disant : « Tais-toi ! ô mon enfant, je jure par Allah, Celui en dehors duquel il n’y a point de divinité, que je ne connais pas sur cette Terre un plus grand savant que lui ».

Malgré tout, devant sa popularité grandissante, certains éprouvèrent de la jalousie à son égard, aussi le dénigrèrent-ils à maintes reprises. Ils désiraient par-dessus tout qu’il soit chassé de Fès et commencèrent des manœuvres visant à atteindre ce sinistre dessein. Seïdina (qu’Allah sanctifie son précieux secret) ne s’en souciait guère, car il savait que c’est par et pour Allah qu’il était parvenu jusque-là et qu’il n’y avait que Lui qui pouvait l’en chasser. Un jour, le Sultan de l’époque Maoulana Souleïman (qu’Allah l’agrée), grand gardien de l’orthodoxie de la religion et savant lui-même, s’intéressa à Seïdina Ahmed Tidjani (qu’Allah sanctifie son précieux secret). Il interrogea des gens influents parmi son entourage à son sujet, mais ceux-ci comptaient parmi les intrigants, ils le critiquèrent alors par crainte que le Sultan ne l’invite à participer à sa prestigieuse assemblée de science. Celle-ci ne réunissait que les plus grands érudits du royaume et était animée devant le Sultan lui-même. Allah décréta néanmoins la présence, à ce moment-là et auprès du Sultan, de l’un des plus renommés et réputés savants de Fès et son Qadi, Sidi Abdelqader ibn Chaqroun (m. 1219 H). Celui-ci prit la défense de Seïdina Ahmed Tidjani (qu’Allah sanctifie son précieux secret). Il énuméra ses mérites ainsi que la particularité de son savoir à tel point que le Sultan fut impatient de le rencontrer. Il désirait également faire toute la lumière au sujet de ce bruit qui courait disant qu’il serait le dépositaire direct du bien aimé Prophète (que la prière et la paix d’Allah soient sur lui) ainsi que son élève et qu’il le voyait à l’état de veille.

Aussi l’invita-t-il (qu’Allah l’agrée) à se joindre aux savants qui constituaient l’élite des érudits dans tous les domaines de la science, afin de prendre place au sein de cette congrégation. Au cours d’une exégèse de la Sourate Nas par l’un des plus prestigieux spécialistes dans ce domaine, le Sultan demanda à Seïdina (qu’Allah sanctifie son précieux secret) de donner son avis sur les différents dires et explications si brillamment exposés à ce moment. Or Seïdina (qu’Allah sanctifie son précieux secret) réfuta certains de ces propos, malgré la contestation de l’intervenant, et exposa un commentaire limpide et étayé avec de nombreuses preuves. Tout d’abord, la noble assemblée resta muette de stupéfaction devant tant de prouesses, puis ils s’exclamèrent : « Par Allah ! C’est bien cela la vérité éclatante ! » Comment un homme en provenance du désert pouvait-il rivaliser et même surprendre un si exceptionnel rassemblement de grands érudits et de sommité sans la moindre difficulté ? Après son départ, le Sultan fut si admiratif qu’il dit aux gens encore présents : « Vous connaissez le degré de Sidi Ahmed Tidjani (qu’Allah sanctifie son précieux secret) et sa majesté dans la science apparente, sachez qu’en ce qui concerne la science cachée, il en est à la fois le père, la mère et leurs enfants. Quel est votre avis ? ». Ils répondirent : « Ces paroles sont véridiques, la vérité s’est manifestée dénuée de tout mensonge et la réalité s’est éclaircie au regard de tous ».

Maoulana Souleïman (qu’Allah l’agrée) sut alors avec certitude que la rumeur disant que Seïdina (qu’Allah sanctifie son précieux secret) voyait le bien aimé Prophète (que la prière et la paix d’Allah soient sur lui) à l’état de veille était véridique et il lui demanda avec persistance la possibilité de le rencontrer à son tour. Malgré ses avertissements sur l’impossibilité de supporter une telle rencontre, le sultan insista tellement que Seïdina (qu’Allah sanctifie son précieux secret) finit par céder et lui donna les conditions à réunir. Le jour de la rencontre, il resta à ses côtés pour l’assister, conformément à sa demande, mais Maoulana Souleïman (qu’Allah l’agrée) ne put supporter l’intensité des lumières précédant la manifestation du bien aimé Prophète (que la prière et la paix d’Allah soient sur lui) et il s’évanouit devant tant d’éclat. En se réveillant, il n’éprouva que plus de respect et d’amour envers Seïdina (qu’Allah sanctifie son précieux secret), il lui demanda l’autorisation afin de s’affilier à cette Tariqa que lui avait confiée le bien aimé Prophète (que la prière et la paix d’Allah soient sur lui).

Le Sultan désirait ardemment que Seïdina (qu’Allah sanctifie son précieux secret) s’installe à Fès, il lui offrit une belle demeure appelée « Dar Miraya » (La demeure des miroirs) comptant parmi ses biens personnels. Seïdina Ahmed Tidjani (qu’Allah sanctifie son précieux secret) eut quelques scrupules et déclina dans un premier temps l’offre du Sultan, il craignait en effet que cette demeure ne fasse partie du patrimoine commun de la couronne. Le bien aimé Prophète (que la prière et la paix d’Allah soient sur lui) l’autorisa à y habiter et, en contrepartie, il devait donner aux pauvres, chaque mois, l’équivalent du loyer en pain, cela tout le long que durerait son séjour dans cette demeure, et ce jusqu’à sa mort. C’est donc ce qu’il fit (qu’Allah sanctifie son précieux secret).

Autrefois, cette demeure appartenait au Pôle Moulay Taïeb ibn Mohamed, enterré à Wazzan (qu’Allah l’agrée). Le Sultan Moulay Souleïman (qu’Allah l’agrée) l’avait racheté à ses héritiers avec une fortune personnelle et provenant de son héritage. Il la rénova par la suite et l’offrit à un noble parmi les gens de Fès. Les juristes de l’époque furent témoins de cette transaction, opérée sur son patrimoine personnel, et c’était notamment ses propres deniers qu’il préférait utiliser (qu’Allah l’agrée). Lors de l’épidémie de peste qui s’abattit en 1213 de l’Hégire, le noble à qui elle avait été offerte décéda. Le Sultan Soulaïman (qu’Allah l’agrée), d’un esprit perspicace, comprit que la valeur monétaire de la demeure serait plus profitable à ses héritiers que le bâtiment en lui-même. Il leur proposa alors de la racheter. Dès lors, elle resta vide un certain temps, jusqu’au moment où il en fit don à Seïdina (qu’Allah sanctifie son précieux secret).

Deux mois après son installation à Fès, soit au début de Chawwal, Seïdina Ahmed Tidjani (qu’Allah sanctifie son précieux secret) ordonna à Sidi Hajj &’Ali Harazim (qu’Allah l’agrée) de composer le célèbre livre Djawahirou-l-Ma’ani. Sidi Hajj &’Ali (qu’Allah l’agrée) avait pris plusieurs notes au fur et à mesure des années et de ses assises avec Seïdina (qu’Allah sanctifie son précieux secret), tout comme certains compagnons. Il avait commencé à les rassembler pour en faire un manuscrit. Cependant, au cours de cette période, Seïdina (qu’Allah sanctifie son précieux secret) lui ordonna de tout déchirer et de s’en débarrasser en raison de l’intensité de sa pudeur envers Allah. Il se conforma donc à son ordre. Puis le bien aimé Prophète (que la prière et la paix d’Allah soient sur lui) intervint en lui ordonnant de le reconstituer et le rassura (que la prière et la paix d’Allah soient sur lui) en ces termes : « C’est mon livre et c’est moi qui l’ai rédigé ». Sidi Hajj &’Ali (qu’Allah l’agrée) rassembla de nouveau les notes qui existaient encore chez certains compagnons et cette œuvre fut terminée un an après, au mois de Dhou-l-Qi’da 1214 H. Seïdina (qu’Allah sanctifie son précieux secret) le valida et certifia son contenu alors qu’il se trouvait à la mosquée Diwan. L’ouvrage reçut le titre de « Djawahirou-l-Ma’ani wa Boulough al Amani fi Faydhi Sidi Abou-l-&’Abbas Tidjani » (L’essence des compréhensions et l’aboutissement des espérances par l’effusion de Sidi Abou-l-&’Abbas Tidjani (qu’Allah l’agrée)). Ce noble livre est un concentré de sciences subtiles et immenses traitant aussi bien du dogme, de l’exégèse, du Hadith, de la jurisprudence, du Soufisme, de l’éducation ainsi que d’autres disciplines qui ne cessent d’abreuver les gens assoiffés de science.

Depuis sa demeure, Seïdina (qu’Allah sanctifie son précieux secret) s’occupait de l’initiation et de l’éducation de ses disciples. Il enseignait et expliquait le Coran ainsi que la tradition du Prophète (que la prière et la paix d’Allah soient sur lui) à des élèves toujours de plus en plus nombreux dont faisait partie un nombre impressionnant de savants érudits, de Aouliya parfaits et de maîtres spirituels. Beaucoup étaient de la noble descendance de notre bien aimé Prophète Mohammed (que la prière et la paix d’Allah soient sur lui).

Dans sa maison Seïdina (qu’Allah sanctifie son précieux secret) vivait entouré de sa famille et de plusieurs domestiques auxquels il était extrêmement attentif, et envers qui il faisait preuve de clémence et de bienveillance. Alors que lui-même (qu’Allah l’agrée) portait des vêtements de qualités moyennes, il faisait don à ses serviteurs d’habits de meilleure qualité. Il pourvoyait (qu’Allah l’agrée) à leur entretien avec soin, plus encore que ne le seraient les serviteurs d’un roi. Cette sollicitude se reflétait sur eux si bien que lorsque des concitoyens croisaient l’un d’entre eux, ils en déduisaient alors : « C’est certainement l’un des serviteurs de Seïdina Ahmed Tidjani (qu’Allah sanctifie son précieux secret) ». Pour ces mêmes raisons, jamais il n’affranchissait ni ne se séparait d’un serviteur qui avait vécu si convenablement au sein de sa maison. Il craignait en effet de leur causer du tort et il dit à ce sujet (qu’Allah sanctifie son précieux secret) : « En nous séparant de ce serviteur, il perdrait les faveurs dont il bénéficiait auprès de nous et nous serions ainsi la cause de son malheur. »

Un jour Seïdina Ahmed Tidjani (qu’Allah sanctifie son précieux secret), en marchant dans les rues de Fès, aperçut certains serviteurs vêtus négligemment, aux corps délabrés et aux vêtements usés alors que c’était une période d’hiver. Il dit alors (qu’Allah sanctifie son précieux secret) : « Il ne plairait pas à Allah que les maîtres de ces serviteurs sentent l’odeur du Paradis »

Lorsqu’il voulait affranchir des serviteurs (qu’Allah l’agrée), et il le faisait souvent et en grand nombre, il les achetait puis, après avoir établi les documents de vente, il rédigeait immédiatement les actes d’affranchissements sans que ceux-ci soient entrés au sein de sa demeure. Ensuite, il octroyait à chaque affranchi une certaine somme d’argent afin de lui permettre d’entamer une nouvelle vie. Il lui arriva un jour d’affranchir, et de cette manière, successivement vingt-cinq personnes. Une autre fois, également dans une même journée, il acquit dix-sept serviteurs qu’il affranchit immédiatement.

Un jour, un homme parmi ce groupe d’affranchi interrogea : « Où est celui qui m’a acheté puis libéré ? » On informa Seïdina Ahmed Tidjani (qu’Allah sanctifie son précieux secret) qui dit : « Emmenez-le-moi. » Lorsqu’il se présenta devant lui (qu’Allah sanctifie son précieux secret), ce nouvel affranchi lui demanda : « Est-ce bien toi qui m’as libéré ? » Il lui répondit par l’affirmative, après quoi cette personne lui déclara : « Alors sache que c’est moi qui m’offre à ton service » Seïdina (qu’Allah sanctifie son précieux secret) accepta sa requête. Par sa compagnie et son service sincère envers lui, il obtint de grandes faveurs spirituelles avec notamment la possibilité de voir souvent le bien aimé Prophète (que la prière et la paix d’Allah soient sur lui). Celui-ci, lorsqu’il apparaissait devant lui, disait (que la prière et la paix d’Allah soient sur lui) : « Sache que je suis Mohammed ibn &’Abdallah, le Messager d’Allah (que la prière et la paix d’Allah soient sur lui)». Ce serviteur n’était autre que le célèbre Sidi Boudjam’a (qu’Allah l’agrée) qui, tout comme l’ensemble des serviteurs de Seïdina (qu’Allah l’agrée), avait pris la Tariqa de ses mains et obtenu l’ouverture des portes de la sainteté.

Il y avait également parmi les serviteurs de Seïdina (qu’Allah sanctifie son précieux secret) Sidi Bilal, Sidi Mess’oud, Sidi Baraka, Sidi Mehdi, Sidi Selim Seghir, Sidi &’Abdallah…Seïdina Ahmed Tidjani (qu’Allah sanctifie son précieux secret) était si soucieux de leur bien-être qu’il maria chacun d’entre eux à l’une des servantes de la maison et ce souci s’étendait aussi aux animaux domestiques, car il ne laissait jamais un mâle ou une femelle sans lui fournir un partenaire. Il mettait d’ailleurs en garde ses disciples à ce sujet en leur disant (qu’Allah sanctifie son précieux secret) : « Celui qui a une servante et qui ne veut pas d’elle, mais qui ne la laisse pas non plus épouser quelqu’un d’autre, alors il n’a qu’à poser ce chapelet ; plus rien ne le lie à nous. » Seïdina Ahmed Tidjani (qu’Allah sanctifie son précieux secret) était doux et clément devant leurs erreurs, veillant à réparer leurs torts avec justice le cas échéant. Une fois l’un de ses jeunes serviteurs a frappé une personne et lui a cassé une dent. L’affaire fut portée devant le juge qui leur dit : « Sidi Ahmed Tidjani est plus en droit que moi pour rendre une sentence sur cet évènement, aussi je vous exhorte à aller le voir. » L’officier les emmena tous deux et ils entrèrent dans la maison de Seïdina (qu’Allah sanctifie son précieux secret). Celui-ci sortit cinquante-deux grands riyals en disant à la victime : « Prends cela et si tu désires que l’on te rajoute, on te rajoutera. » Mais il refusa et il dit : « Je lui pardonne pour toi. » Seïdina ne cessa pas de lui demander de prendre et l’autre de répondre à chaque fois : « Je lui pardonne pour toi » jusqu’à ce que finalement il se contenta de prendre deux de ces riyals et de les donner à l’officier. Alors ils retournèrent auprès du juge et l’informèrent de la situation. Il s’exclama en ces termes : « Qu’Allah soit satisfait de Sidi Ahmed, il est le plus apte à rendre justice ». Puis il ordonna à l’homme de se rendre auprès du témoin instrumentaire afin qu’il notifie la reconnaissance d’encaissement et d’acquittement et qu’il l’envoie à Seïdina, qui suite à cela ne fit aucun reproche au jeune serviteur.

Les provisions quotidiennes destinées à l’usage de la maison de Seïdina (qu’Allah sanctifie son précieux secret) étaient considérables, au point que les gens qui ne le connaissaient pas croyaient qu’il s’agissait là des provisions de plusieurs maisons. Il stockait des vivres pour une année, céréales, huiles, miel, et fruits, en quantité suffisante pour sa famille ainsi que ses invités, de manière à pouvoir en disposer avec abondance et ainsi offrir des repas préparés avec largesse et générosité. Le but était de les contenter et de déverser sur eux les bienfaits de leur Seigneur, non pas en vue du confort et du raffinement. Il déclarait parfois que si ce n’était par délicatesse envers eux et par volonté de se mettre à leur niveau de compréhension en les préservant ainsi du désir de posséder ce que détiennent les gens, il n’aurait gardé aucune provision chez lui. Lui-même (qu’Allah sanctifie son précieux secret) ne prenait qu’un seul repas par jour vers le milieu de la matinée. Il en mangeait un peu puis en distribuait le reste.

Il subvenait aux besoins de ses invités, des faibles et des besogneux en quête d’Allah parmi ceux qui lui tenaient compagnie. S’ajoutait à cette catégorie de gens, ceux dont il assumait les dépenses et ceux qui venaient chez lui. Il pourvoyait ainsi aux besoins d’un nombre incalculable de gens, en parlant du bienfait d’Allah à son égard il dit une fois : « Si je voulais dépenser pour soixante-dix mille demeures, certainement je l’aurais fait. ». Une cargaison entière de blé suffisait à peine pour deux ou trois jours, quant aux moments où les délégations de visiteurs affluaient chez lui (qu’Allah sanctifie son précieux secret), aucune estimation quantitative ne pouvait être faite. Malgré cela, il n’éprouvait pas la moindre inquiétude, quel que soit le nombre de ses visiteurs. Parmi ses habitudes, il ne destinait rien à ses invités ou à d’autres sans avoir au préalable contenté les gens de sa maison. Par contre, si un jour il réservait à ses visiteurs un plat dont il ne disposait pas suffisamment chez lui, il en préparait immanquablement un autre à l’adresse de sa famille. En effet, il veillait à ne pas favoriser un devoir aux dépens d’un autre. Quand il y avait un reste de plat, il cherchait quelqu’un pour se charger de le terminer sur-le-champ. Dans l’éventualité où il envoyait à l’extérieur de la nourriture destinée à ses invités et que ceux-ci n’avaient pas tout consommé, Seïdina (qu’Allah sanctifie son précieux secret) donnait ce reste en aumône. Ainsi rien de ce qu’il dépensait en nourriture pour Allah Le Très-Haut ne revenait chez lui.

Un jour, il évoqua (qu’Allah sanctifie son précieux secret) le sujet du don et de son acceptation. Il souligna qu’il devait s’effectuer uniquement par Allah et pour Allah. Il stipula en outre que le don ou son acceptation pour autre qu’Allah le Très Haut aurait pour résultante le malheur. Puis il clama (qu’Allah sanctifie son précieux secret) : « Celui qui me donne quelque chose pour ma propre personne aura récolté le malheur. »

Une fois il fut interrogé sur la raison pour laquelle souvent il n’acceptait pas les dons alors que le Prophète (que la prière et la paix d’Allah soient sur lui) les acceptait, il dit : « Auparavant les dons étaient des dons, mais aujourd’hui ils sont devenus des pots-de-vin. »

Un jour un homme est venu auprès de lui (qu’Allah sanctifie son précieux secret) puis il lui adressa ces paroles : « ô mon maître ! Je te fais don de telle part de mon argent par amour pour toi et en tant que rançon de ma part. » Il accepta son offre et le posa entre ses mains. Puis, ce dernier lui chuchota à l’oreille en disant : « ô mon maître, je te demande de me faire ceci et cela ! ». Seïdina (qu’Allah sanctifie son précieux secret) lui dit alors : « Reprends ton bien ! » et il ne l’accepta pas de lui.

Parmi ses habitudes (qu’Allah sanctifie son précieux secret), il dépensait en aumônes de jour comme de nuit. Chaque semaine, il distribuait du blé aux besogneux de la région parmi les faibles, les orphelins, les veuves et tous les nécessiteux en fonction de la situation de chacun. De même, lors de chaque fête de ‘Aïd, il distribuait en début de matinée du pain aux enfants à partir du seuil de sa maison. Il agissait de même envers celui qui était dans l’incapacité d’assumer ses propres besoins parmi ses compagnons (qu’Allah sanctifie son précieux secret), et il les aidait financièrement. Il dépensait ainsi des fortunes et des dons considérables hors de la portée de n’importe quel riche commerçant, et ce n’était là qu’un aperçu des nombreux signes et prodiges d’Allah et une bénédiction Mohammadienne parmi celles héritées du bien aimé Prophète (que la prière et la paix d’Allah soient sur lui). Les gens atteints par la maladie du doute faisaient courir la rumeur qu’il utilisait la science de l’alchimie et lorsqu’ils voyaient l’énorme charge de charbon nécessaire aux besoins de la maison, ils prétendaient que c’était pour les transformer en or.

Seïdina Ahmed Tidjani (qu’Allah sanctifie son précieux secret) était ainsi constamment bienveillant envers tout un chacun. Qu’ils soient citadins ou Bédouins, il les considérait comme ses propres enfants, ou comme ses frères, ou encore comme des amis. Même les animaux recevaient leur part de générosité, car il envoyait chaque soir un de ses serviteurs nourrir les chats du quartier.

Lorsque le trésorier de la maison décéda, ses enfants vinrent rendre le dépôt que leur père gardait pour Seïdina (qu’Allah sanctifie son précieux secret) et il s’agissait d’une somme considérable en or. Il refusa de le reprendre et le leur offrit dans sa totalité en disant : « Votre père, qu’Allah lui fasse miséricorde, est resté des années avec nous. Gardez cet argent pour vous, ce n’est rien ». Il considérait l’ensemble de ses biens comme un dépôt d’Allah dont il était responsable et il disait (qu’Allah sanctifie son précieux secret) : « L’argent est la propriété exclusive d’Allah ! Je ne suis que Son simple trésorier, astreint à la gérance de Ses biens et qui en a la lieutenance. » Il incitait ses disciples à la générosité en leur disant : « Parmi les meilleures œuvres surérogatoires du serviteur se trouve l’aumône quotidienne même si elle est minime. » Il avait l’habitude d’être extrêmement discret et la plupart du temps il ne voulait pas que les bénéficiaires sachent qu’il était l’auteur du don. Souvent, il mandatait quelqu’un pour aller le remettre en lui ordonnant de ne rien dire à ce sujet. Cette attitude était une préservation pour celui qui était dans le besoin et une volonté d’élever son aspiration. Ainsi, ce dernier remerciera son Seigneur et ne s’attachera pas à celui par lequel Allah lui avait fait parvenir ce bien.

Parmi ses compagnons, il n’en est pas un seul qui, à un moment ou à un autre, n’a pas bénéficié de ses dons, faveurs et bienfaits. Seïdina (qu’Allah sanctifie son précieux secret) veillait constamment à purifier leur intention dans chaque acte, chaque parole, chaque élan du cœur. Une fois Seïdina Ahmed Tidjani (qu’Allah sanctifie son précieux secret) a dit au sein d’une assemblée : « Celui qui m’aime pour Allah le Très Haut et son Messager (que la prière et la paix d’Allah soient sur lui), qu’il m’aime ainsi. Quant à celui qui m’aime pour des biens intéressés alors, par Allah en dehors de qui il n’y a point d’autre divinité que Lui, je ne possède rien de plus qu’un homme ordinaire, et rien d’autre ». Ensuite, Sidi Mohamed el Ghali (qu’Allah l’agrée) profita du moment où Seïdina (qu’Allah sanctifie son précieux secret) fut distrait pour lui embrasser le pied tout en disant : « Qu’il soit le bienvenu cet homme ordinaire par qui ses compagnons ont dépassé les plus grands Pôles. » Il lui répondit : « C’est vrai, mais qu’est ce que c’est pour Allah le Très Haut ? »

Seïdina Ahmed Tidjani (qu’Allah sanctifie son précieux secret) prenait la Sunna pour juge, pour lui ainsi que pour sa famille. Il fit en sorte qu’elle soit sa référence dans chacun de ses actes et états. Il disait (qu’Allah sanctifie son précieux secret) : « Tout le bien est dans le suivi de la Sunna et tout le mal est dans sa transgression. ».

Dans sa demeure il ne commettait aucun acte allant à l’encontre de la sunna. Il sevra sa famille de toutes les coutumes et innovations qui étaient courantes à son époque. De même, lorsqu’il constatait une infraction dans un acte de bienséance décrété par la Loi, il en informait la personne concernée ou la réprimandait si celle-ci le faisait sciemment en lui disant (qu’Allah sanctifie son précieux secret) : « Est-ce cela que nous enseigne la Sunna ? »

Un jour quelqu’un vint pour le saluer et, une fois en sa présence (qu’Allah sanctifie son précieux secret), il se jeta à terre pour embrasser le sol par vénération. Seïdina (qu’Allah sanctifie son précieux secret) lui dit alors : « Tu viens de commettre un acte de mécréance. Tu dois dire : « J’atteste qu’il n’y a pas de divinité autre qu’Allah et j’atteste que Mohammed est le Messager d’Allah » ».

Dans ses exhortations et dans tous ses écrits, il rappelait (qu’Allah sanctifie son précieux secret) la nécessité de s’attacher à la Sunna, à l’exemple des conseils suivants : « Je te conseille la crainte d’Allah aussi bien intérieurement qu’extérieurement et de suivre la Sunna qu’elle soit loin, proche ou exceptionnelle, dans les paroles et les actes (…) et de prendre pour chaque situation la Sunna comme juge […] »

Il a laissé pour tous ceux qui le suivent, et en chaque époque, une règle d’or en disant : « Pesez les propos qui me sont attribués avec la balance de la Chari’a. Ce qui en est conforme, prenez-le et ce qui en diverge, délaissez-le ».

Il a reçu (qu’Allah sanctifie son précieux secret) une force incommensurable dans le suivi des actions prophétiques à la mesure de l’abondance de ses lumières et de l’intensité de son état, car cela est l’origine même de la Connaissance. Il a dit (qu’Allah sanctifie son précieux secret) : « Quant à la Connaissance et la méthode pour y accéder c’est en suivant le Prophète (que la prière et la paix d’Allah soient sur lui) dans l’ensemble de ses paroles, ses actes, ses états, ses caractères, dans l’observance des Droits Divins -qu’Il soit Glorifié et Exalté- en secret et en public, le tout accompli sincèrement pour Allah sans aucune altération quelconque par des choses mondaines ou celles de l’au-delà. Que tout cela ne soit accompli qu’afin d’Exalter Allah et de Le Magnifier, sur le tapis de l’agrément, de la soumission, en s’en remettant à Lui, en comptant sur Lui -qu’Il soit Exalté- en toute chose, en retournant à Lui pour toute chose. »

Il évoqua une fois le cas d’un groupe d’innovateurs connu qui prétendaient mensongèrement au Soufisme, il a dit (qu’Allah sanctifie son précieux secret) : « Allah leur a prescrit la supercherie en ce monde et le Feu dans l’au-delà. »

Il veillait (qu’Allah sanctifie son précieux secret) au délaissement des prétentions et des curiosités et orientait perpétuellement les gens dans ce sens de par son état ainsi qu’avec sa parole. Il célébrait les œuvres obligatoires et surérogatoires, tout en accomplissant les meilleures d’entre elles, sans distraction ni négligence. Il veillait toujours à la préservation des prières dans leur temps légal et en groupe, en prenant garde à leurs parfaites inclinaisons et prosternations. Il les accomplissait sublimement, de la plus parfaite manière avec quiétude, sérénité et bienséance envers Allah, à l’image de la prière des Connaissants respectueux. Un jour, un savant voyagea dans l’intention de le rencontrer et à son arrivée, Seïdina (qu’Allah sanctifie son précieux secret) était en train d’accomplir la prière avec ses compagnons. Il fut si émerveillé de voir leurs manières et leurs attitudes dans la prière qu’il en déclara : « Par Allah, c’est certainement celle-là la prière des pieux ancêtres (Salaf Salih) telle qu’on ne la trouve plus. »

Parmi les conseils qu’il donnait, il dit : « Prenez extrêmement garde à ne pas chuter dans la perdition, en laquelle tombent les gens, à cause de leur inattention vis-à-vis du perfectionnement de leur prière. »

Il veillait particulièrement à la sincérité dans les actes accomplis et plus particulièrement en ce qui concernait la prière. Un jour, dans un village du désert, lors de la prière du vendredi (Djoumou’a) et du fait de la présence de Seïdina (qu’Allah sanctifie son précieux secret) dans les rangs, l’imam qui la présidait prolongea beaucoup la récitation. Lorsque ce dernier eut achevé la prière, Seïdina (qu’Allah sanctifie son précieux secret) l’interrogea : « Est-ce ainsi que tu pries d’habitude ? » Il répondit : « Non. » Il lui dit alors (qu’Allah sanctifie son précieux secret) : « Tu dois recommencer ta prière » et il la recommença.

Pour illustrer le côté néfaste de la perception d’un salaire pour diriger la prière ou pour toute œuvre pieuse telle que l’Adhan, le témoignage, l’enseignement de la science et l’émission d’avis juridique (Fatawa), il raconta (qu’Allah sanctifie son précieux secret) : « Il y avait un Imam qui percevait un salaire pour la prière et qui en faisait l’aumône. Lorsqu’il mourut, les Anges interrogateurs se présentèrent à lui, mais il resta pétrifié et sans voix ne sachant plus ce qu’il devait leur répondre et il semblait alors indéniable qu’il était sur le point de subir de terribles épreuves. À ce moment critique, une personne à la belle apparence apparut et lui dicta les réponses. Puis, quand les deux Anges s’en allèrent, il l’interrogea : « Par Allah, qui es-tu ? » Il lui répondit : « Je suis tes œuvres pieuses. » Il lui dit alors : « Mais où étais-tu passé ? » Il lui répondit : « C’est parce que tu prenais un salaire pour ta fonction d’Imam. » Il lui dit : « Je jure par Allah que pas une seule fois au cours de ma vie je ne l’ai utilisé pour moi, mais j’en faisais l’aumône. » Il lui avoua alors : « Sache que si tu les avais utilisés tu ne m’aurais jamais vu. » » Seïdina Ahmed Tidjani (qu’Allah sanctifie son précieux secret) avait déclaré une fois : « Même si on me proposait tout ce qui me convient, certainement je n’aurais pas accompli une seule prière pour un salaire ».

Celui qui connaissait l’état de Seïdina (qu’Allah sanctifie son précieux secret) craignait de se mettre à ses côtés dans le rang des prieurs de peur de le déranger. Il incitait souvent les gens à célébrer les prières en leur temps et en groupe tout comme il les encourageait à veiller la nuit pour des adorations, particulièrement sa dernière partie. À ce sujet, il les exhortait avec insistance et les poussait à mettre en pratique ce conseil en leur disant (qu’Allah sanctifie son précieux secret) : « C’est le moment de la descente des miséricordes et c’est à cette période-là que se présentent les occasions du salut. Celui qu’Allah a réveillé durant ce laps de temps, certainement, il est invité à Sa miséricorde. »

Seïdina Ahmed Tidjani (qu’Allah sanctifie son précieux secret) était d’un cœur délicat, il faisait preuve de clémence envers chaque musulman et il souriait à tous ceux qui le rencontraient. Chacun pensait être le plus proche de lui en raison de son enthousiasme à son égard, ses bonnes paroles et ses attentions, si bien que le malheureux qui le rencontrait oubliait sa tristesse qui se dissipait par le simple contact d’avec lui. Il incitait à la sincérité des sentiments d’amour et de fraternité, mettant en garde contre la seule prétention de la langue, il racontait à ce sujet : « Un certain chasseur avait attrapé trois perdrix, il en attacha deux puis sacrifia le troisième et commença à le déplumer, or ses yeux pleuraient à cause d’une maladie. L’une des deux perdrix le regarda et dit à l’autre : « C’est un pauvre homme et son cœur s’est attendri pour nous, il se peut qu’il nous délivre. » L’autre lui dit : « A quoi sais-tu cela ? » Il répondit : « Je viens de voir ses yeux qui pleurent. » Il dit alors : « Regarde plutôt ce que font ses mains et ne regarde pas ses yeux. »

Il ne se ménageait pas à la tâche et se mettait au service de sa famille, accomplissant n’importe quelle tâche, quelle que soit sa difficulté. Il n’aimait pas non plus être distingué ou particularisé par quoi que ce soit et se considérait l’égal des autres. Il disait (qu’Allah sanctifie son précieux secret) : « Peut-être qu’Allah nous accordera Sa miséricorde avec l’ensemble des musulmans ».

Une fois, quelqu’un lui a dit à titre d’éloge : « Tu vois le Prophète (que la prière et la paix d’Allah soient sur lui) à l’état de veille et tu as dit ceci et cela… » Il répondit (qu’Allah sanctifie son précieux secret) : « Cela est effectivement vrai, pourtant nous ne cessons d’aspirer à être musulman et par Allah nous n’avons pas encore goûté réellement à l’Islam. »

Un célèbre poète de Tlemcen lui écrivit également une lettre contenant un poème élogieux à son égard. Il s’empressa de lui répondre en ces termes (qu’Allah sanctifie son précieux secret) : « Sache, ô Sidi, que je suis loin de ces éloges dont tu m’as honoré. Par Allah, en dehors de qui il n’y pas d’autre divinité que Lui, nous ne possédons rien de tout cela. Je me considère même comme noyé dans les océans de la désobéissance et de l’ignorance. Seulement, Allah le Très Haut m’a saisi par Sa Grâce et Sa Miséricorde sinon il n’y aurait pas de perte évidente plus immense que la nôtre. Quant à toi, qu’Allah te récompense pour ta bonne pensée envers nous. »

Il reconnaissait le droit des gens sur lui et disait à ce sujet (qu’Allah sanctifie son précieux secret) : « Nous n’avons jamais pu donner entièrement le droit qui leur revient à ceux que nous connaissons, et nous n’y arriverons jamais ».

Il disait aussi (qu’Allah sanctifie son précieux secret) : « Le véritable croyant voit les droits de la création sur lui et ne voit aucun droit en sa faveur sur les autres ».

Son comportement, envers ceux dont les préoccupations étaient de lui nuire, consistait à leur pardonner et à ne pas leur en vouloir. Il leur cherchait des excuses tout en les regardant avec l’œil de la Vérité. Il disait (qu’Allah sanctifie son précieux secret) : « Quand je regarde les gens, je considère qu’ils sont assujettis au déroulement des Décrets d’Allah , donc je les excuse. En effet, les reproches sont la conséquence de l’absence de contemplation de l’ordre provenant d’Allah, qui est sans aucun doute exécuté ».

Il avait tellement de compassion envers eux qu’il transmit une lettre au bien aimé Prophète (que la prière et la paix d’Allah soient sur lui) par l’intermédiaire du noble Mohamed ibn &’Arabi Damraoui (qu’Allah l’agrée) où il exprima la demande suivante : « Au Nom d’Allah le Tout-Miséricordieux, le Très-Miséricordieux et que la prière d’Allah soit sur notre maître Mohammed ainsi que sur sa famille. ô mon maître, je te demande à jamais et éternellement la protection complète contre ta colère pour tous ceux qui me détestent ou contre qui je me suis mis en colère et pour tous ceux qui sont irrités contre moi ou contre qui je serais irrité, car ô mon maître, je suis très affligé par ta colère envers les gens par ma cause. » Le bien aimé Prophète (que la prière et la paix d’Allah soient sur lui) lui répondit par l’intermédiaire de Sidi Mohamed ibn &’Arabi Damraoui (qu’Allah l’agrée) : « Sachez que je ne me mettrais en colère que contre celui qui vous insultera, toi et Tidjani, en voulant votre perte. Celui qui fera cela ou qui se montrera hostile envers vous, alors je serais en colère contre lui le Jour du Jugement. Quant à celui qui vous aime, il fait partie des gens du salut. Il sera le premier pour qui j’intercéderai le Jour du Jugement et il ne sera pas jugé […]»

Quand il arrivait que l’un de ses compagnons se plaigne à lui en raison d’une injustice causée par un tiers, il atténuait ce désagrément puis l’encourageait à l’indulgence et au pardon. Il l’incitait également à se préoccuper de lui-même et de ce qui le concernait. Il désapprouvait en effet l’obstination de certaines gens dans la défense de leur personne tout comme il n’aimait pas ceux qui passaient leur temps dans la calomnie. Il réprouvait également la rudesse et l’indélicatesse et ceux qui en étaient imprégnés. Un jour une personne détourna mille riyals faisant partie de ses biens (qu’Allah sanctifie son précieux secret) et les compagnons se mirent à l’humilier en raison de cela. Aussi, Seïdina (qu’Allah sanctifie son précieux secret) prit un papier où il écrivit : « Louange à Allah, il atteste sur lui-même, Ahmed ibn Mohamed Tidjani qu’il a pris untel comme aimé, en ce qu’aucun péché ne peut briser et aucune œuvre ne peut séparer, et ce quoi qu’il ait accompli ». Ensuite, il le donna à celui qui était l’objet des railleries qui fut alors envié par les gens présents.

Indéniablement, Seïdina Ahmed Tidjani (qu’Allah sanctifie son précieux secret) cherchait toujours la discrétion et la réserve. Il s’abandonnait aux recoins de l’oubli et du détachement, ne prêtant guère attention à la création, qu’elle s’empresse vers lui ou au contraire, qu’elle lui manifeste une totale indifférence. Il fuyait (qu’Allah sanctifie son précieux secret) la rencontre des hommes distingués ainsi que les détenteurs de l’autorité et mettait en garde contre le fait de rechercher leur compagnie en disant : « Certainement, ceci est une épreuve dans la religion ». Il détestait être connu de l’un d’eux, à l’exception de celui qui était sincère et dont la visite était en vue d’Allah. Dans ce cas, il lui souhaitait le bien, l’exhortait, l’incitait, et le conseillait. Parmi les marques de son renoncement aux honneurs, il y avait son refus catégorique de rencontrer certains gouverneurs qui avaient sollicité sa présence.

De plus parmi les caractéristiques évidentes de sa bienséance intérieure envers Son Seigneur et Maître le Très Haut, qui se manifestaient dans ses paroles et ses actes, le fait qu’il ne faisait pas de choix avec Allah. Et cela se manifestait à un tel point que lorsqu’il invoquait Allah pour lui-même ou en faveur de quelqu’un d’autre, au sujet d’une affaire dont l’issue est inconnue ou approximative, son invocation consistait à demander à Allah le bien en général.

Il disait souvent (qu’Allah sanctifie son précieux secret) : « Je n’invoque que par ma langue ; quant à mon cœur, il est soumis à Allah. ».

Il disait aussi (qu’Allah sanctifie son précieux secret) : « Je ne désire rien ! Je ne demande rien ! Tu fais ce que Tu veux ! Et Tu décrètes ce que Tu veux ! » .

Il affirmait (qu’Allah sanctifie son précieux secret) : « Certainement, je ne fais que me conformer à la demande des créatures avec la langue et rien de plus, afin de ne pas froisser leurs cœurs. »

Seïdina Ahmed Tidjani (qu’Allah sanctifie son précieux secret) enseignait à ses compagnons que certainement ce qu’Allah choisit pour son serviteur est préférable à ce que ce dernier choisirait pour lui-même.

Quant aux invocations stipulées par la révélation, avec ce qu’elles contiennent en tant qu’exhortations, réprobations, rapprochements et lien avec Allah Sanctifiée est Sa Majesté, ou bien celle qui englobent les qualités de la servitude : tel que le fait de manifester le grand besoin, l’adulation, l’imploration, l’assujettissement à Allah le Glorifié ; et celle qui concerne la demande du repentir, du pardon, de la miséricorde, de l’acceptation de ce qui provient de la part d’Allah le Très Haut, il (qu’Allah sanctifie son précieux secret) ne cessait de les réciter avec sa langue et de bon cœur en précisant (qu’Allah sanctifie son précieux secret) : « Certainement, ce n’est pas du choix avec Allah, car son accomplissement est ordonné par la Révélation. ». Il lui arrivait souvent de dire cette invocation : « Qu’Allah t’accepte par le biais de Sa grâce et de Son agrément. ».

Parmi ce qui fait partie de sa bienséance, le fait qu’il n’engageait point de discussion au sujet des orientations relatives aux Décrets d’Allah, le Glorifié et le Très-Haut, ni en s’opposant par ses propos à ce qui est advenu, ni en espérant le non-avènement d’un événement en cours de réalisation. Il considérait ces agissements-là comme une opposition envers Allah et une impolitesse à Son égard. Seïdina Ahmed Tidjani (qu’Allah sanctifie son précieux secret) racontait à ce sujet une histoire connue au sujet d’un roi d’autrefois, se déroulant comme il suit :

« Un roi possédait un jeune serviteur très cher à ses yeux, ses commandants l’ont donc interrogé à ce sujet. Par conséquent il a voulu leur monter la marque de sa supériorité. Il sortit alors une pierre immensément précieuse et il leur ordonna de la casser. Or chacun d’eux lui conseilla de la conserver. Puis, il ordonna au jeune serviteur de la casser et celui-ci s’exécuta sur-le-champ, sans aucune hésitation. Suite à cet agissement, le roi le réprimanda avec gravité sur son action, mais la seule réaction de ce dernier fut de ne cesser de l’implorer en ces termes : « ô mon seigneur ! ô mon maître ! ». À ce moment, le Sultan s’adressa aux autres en disant : « Quant à vous ! Je vous ai ordonné en premier lieu, et vous avez cherchez à me raisonner. Par contre, si vous l’aviez cassé et qu’ensuite je vous en avais fait des reproches, vous auriez incontestablement contesté en disant : « C’est toi qui nous l’a ordonné ! ». Alors que celui-là, il s’est exécuté en premier lieu, puis il m’a imploré en second lieu. C’est pour cette raison que je l’aime. ».

Et tel était l’aspect de la bienséance intérieure de Seïdina Ahmed Tidjani (qu’Allah sanctifie son précieux secret).